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Covid 19 : est-il vrai que la majorité des personnes hospitalisées en Israël sont vaccinées ?

C’est vrai, mais cela ne prouve pas l’inefficacité des vaccins. Les vaccinés hospitalisés sont proportionnellement bien moins nombreux que la part de personnes à risque vaccinées, démontrant que la vaccination réduit fortement le risque d’être admis à l’hôpital.
par Florian Gouthière
publié le 9 août 2021 à 19h16
Question posée le 06/08/2021.

Selon les chiffres les plus récents du ministère de la Santé israélien, relayés par la presse nationale durant la première semaine du mois août, la vaccination diminuerait le risque d’hospitalisations de 93 % pour le variant Delta (contre 97,5 % pour la variante Alpha). Dans le même temps, divers médias ont relayé des données – apparemment contradictoires – selon lesquelles la majorité des israéliens hospitalisés pour Covid étaient pleinement vaccinés. Mi-juillet, les chiffres de la presse nationale renvoyaient ainsi à une proportion de 3 vaccinés pour 5 patients hospitalisés pour forme grave. D’autres chiffres, plus récents, font état de taux de vaccinés encore plus élevés dans certains hôpitaux.

Illusion statistique

Le paradoxe (qui n’en est pas un) s’explique simplement. Dans la population à risque de formes graves de Covid, l’immense majorité des personnes est vaccinée – 90 % des plus de 60 ans ont en effet déjà reçu deux doses de vaccins. Bien qu’une très faible proportion de vaccinés développent une forme grave de la maladie s’ils sont exposés au virus, le nombre absolu d’individus concernés est grand, puisque celui des vaccinés est grand.

Les non-vaccinés sont, proportionnellement, plus nombreux à développer des formes graves de la maladie. Mais la part de personnes à risque non-vaccinées (qui n’a reçu aucune dose ou une seule dose de vaccin) étant très faible en Israël, le nombre absolu d’individus concerné est également faible.

De façon générale, pour déterminer si un vaccin diminue efficacement un risque (développer une forme symptomatique du Covid, être hospitalisé, décéder…), il est nécessaire de comparer la proportion de personnes touchées dans une population vaccinée avec la proportion touchée dans une population non-vaccinée. Pour que cette comparaison soit pertinente, ces populations doivent être d’âge comparable, et leur niveau d’exposition au virus doit être similaire.

Surtout, comparer en valeur absolue le nombre de personnes touchées n’a de sens que s’il y a autant de vaccinés que de non-vaccinés dans les deux groupes considérés, ce qui n’est plus le cas en Israël depuis déjà plusieurs mois.

44 décès au mois d’août

Mi-juillet, la chaîne israélienne Channel 12 News Israel notait que 61 personnes étaient hospitalisées dans un état grave. Parmi les personnes âgées de plus de 60 ans, près d’une sur cinq (8/44) était non-vaccinée, alors que les non-vaccinés représentent moins d’une personne sur dix dans la population de cette classe d’âge. Par ailleurs, parmi les 17 personnes de moins de 60 ans hospitalisées dans un état grave, seule une était vaccinée.

Selon les derniers chiffres communiqués par le ministère, 618 patients sont actuellement hospitalisés en Israël des suites d’une infection au Covid-19, parmi lesquels 360 «dans un état grave», dont 57 sous respirateur. Pour l’ensemble du mois de juillet, 44 décès auraient été recensés. Ce 9 août, Sharon Alroy-Preis, responsable des services de santé publique au sein du ministère de la Santé israélien, a déclaré à la presse qu’«il n’y avait [actuellement] pas de patients de moins de 60 ans vaccinés hospitalisés», mais qu’il y avait bien des «personnes de moins de 60 ans non-vaccinées», sans détailler le nombre de cas concernés. Contacté par Libération, le ministère ne nous avait pas transmis ces informations à l’heure de la publication de cet article.

Notons que la semaine passée, le directeur de l’hôpital Herzog à Jérusalem a déclaré à l’antenne d’une chaîne nationale que «85 à 90 % des hospitalisés [dans cet hôpital] sont complètement vaccinés». Interpréter cette déclaration est toutefois difficile sans disposer d’informations sur l’âge des patients, et surtout sur le taux de vaccination dans cette même classe d’âge dans la ville de Jérusalem, zone urbaine la plus peuplée du pays.

Un effet du variant Delta ?

En soi, l’importante proportion de personnes vaccinées dans les hôpitaux n’est donc nullement un indice de l’inefficacité du vaccin. Elle est seulement la traduction logique de la très forte couverture vaccinale dans le pays. Toutefois, si la proportion de vaccinés hospitalisés augmentait plus vite que la part des vaccinés dans la population, cela pourrait signifier que la protection conférée par le vaccin diminue dans le contexte épidémique actuel. La moindre sensibilité du vaccin au variant Delta pourrait être une piste d’explication. Toutefois, des indices d’une diminution de l’efficacité du vaccin plusieurs mois après l’administration de la seconde dose sont également avancés.

Les autorités sanitaires israéliennes ont débuté une campagne d’injection d’une troisième dose auprès de populations à risque – l’OMS appelant de son côté à un moratoire sur de telles «troisièmes doses», considérant que de nombreux pays touchés par la pandémie peinent à s’approvisionner pour leurs premières et secondes doses.

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