20% de femmes actives ont dû faire face à une situation de harcèlement sexuel au cours de leur vie professionnelle. Ce chiffre n’a pas baissé depuis le dernier sondage sur le sujet, puisqu’en 1991, 19% des femmes actives se sont estimées victimes. Un chiffre aussi sans doute sous-évalué, un certain nombre de victimes ayant honte de ce qui leur est arrivé n’osant pas du tout en parler.

Dans 75% des cas, il s’est agi de gestes ou propos à connotation sexuelle répétés dans le cadre du travail, malgré l’absence de consentement des femmes concernées. 18% ont été victimes d’un chantage sexuel. 61% des femmes actives travaillent dans un environnement de blagues sexuelles, 18 % ont reçu des courriels à caractère sexuel et 18% ont subi l’affichage d’images porno.

30% étaient en situation précaire, facteur de vulnérabilité, tout comme le fait de travailler dans un environnement masculin.

40% des harceleurs étaient un collègue, 18% un supérieur hiérarchique, 22% le patron ou l’employeur. D’où la difficulté d’alerter la direction de l’entreprise pour les victimes. « Elles savent que l’arbitrage ne se fera pas en leur faveur, dénonce Marilyn Baldeck, déléguée générale de l’Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT). La direction préfère garder un manager ou un commercial qui fait du chiffre plutôt qu’une salariée moins bien payée. »

3 victimes sur 10 n’en ont parlé à personne. Et quand elles en parlent, c’est à leur famille et leurs amis (55%) ou leurs collègues proches (51%). Mais 65% des victimes estiment qu’elles n’ont pu compter que sur elles-mêmes.

Dans 69% des cas, la situation n’a pas été portée à la connaissance de la direction. Lorsqu’elles l’ont fait, 40% des femmes actives victimes de harcèlement estiment que l’affaire s’est terminée à leur détriment.

Un tiers (33%) des victimes ont subi des conséquences sur leur santé ou leur mental. « Le harcèlement sexuel provoque un traumatisme répété sur une longue durée qui atteint profondément l’estime de soi », analyse le professeur Charles Peretti, psychiatre qui dirige la consultation harcèlement sexuel de l’hôpital Saint-Antoine à Paris. Arrêts maladie à répétition, dépression, dépendance aux antidépresseurs ou aux drogues, elles doivent faire tout un travail de reconstruction même longtemps après les faits.

28% ont été bloquées dans leur carrière, 14% ont vu leur contrat non renouvelé. 10% ont été licenciées, 9% ont dû démissionner à la demande de l’employeur. Des conséquences lourdes sur leur carrière et souvent difficiles à surmonter, dans un contexte de crise économique.

Dans un quart des cas (24%) seulement, le harceleur a été sanctionné.

Seules 5% des victimes ont porté les faits devant la justice, au pénal ou devant les prud’hommes. Une raison évidente : 90% des plaintes étaient classées sans suite, et sur les dix restant le harceleur bénéficiait d’une relaxe, selon les chiffres rendus publics avant le vote de la nouvelle loi en 2012. Rien n’indique que les choses aient changé pour l’instant.

Source : sondage réalisé du 15 au 24 janvier 2014 par Ifop pour le Défenseur des droits sur un échantillon de 1 005 personnes, représentatif de la population française, par questionnaire auto-administré en ligne.