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Dans les archives de Match - Il y a 20 ans, la disparition de la reine-mère

La reine-mère saluant la foule venue au bas de sa résidence londonienne de Clarence House pour lui souhaiter un joyeux 78e anniversaire, le 4 août 1978.
La reine-mère saluant la foule venue au bas de sa résidence londonienne de Clarence House pour lui souhaiter un joyeux 78e anniversaire, le 4 août 1978. © Hilaria McCarthy/Daily Express/Hulton Archive/Getty Images
CM , Mis à jour le

Le 30 mars 2002 s’éteignait la «Queen Mum», mère de la reine Elizabeth II et personnage adoré de ses sujets... Avec Rétro Match, suivez l’actualité à travers les archives de Paris Match.

Elle avait traversé le siècle en devenant tour à tour duchesse, reine et impératrice des Indes, puis reine-mère. Le 30 mars 2002, la Grande-Bretagne pleurait son plus charmant sourire : «Queen Mum» vient de s’éteindre à 101 ans. La monarchie perd avec elle son meilleur atout: son dévouement à son mari, le roi George VI, son courage pendant le blitz et sa formidable énergie avaient fait d’elle la personnalité la plus populaire de la famille royale. En vraie «lady», elle cultivait ses penchants pour les courses de chevaux, le gin tonic et les chapeaux fleuris. De l’Ecosse, sa terre natale, à Windsor où elle allait être enterrée, le royaume tout entier avait rendu hommage à sa grand-mère préférée...

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Voici le grand récit de la vie de la Reine-Mère, tel que publié dans Paris Match en 2002.

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Paris Match n°2759, 11 avril 2002

Adieu à la Reine mère, légende d’un siècle

Par Irène Frain

Elle est née en 1900, elle est montée sur le trône en 1936, et pendant la guerre, elle a incarné le courage de l’Angleterre. De la reine Victoria aux Spice Girls, elle a toujours été en phase avec son peuple.

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C’est un très jeune Anglais, il n’a pas 20 ans, sa voix se casse et se mêle de larmes. On s’étonne. «Mais enfin, la reine mère, à votre âge, vous l’avez si peu connue...» Il renifle encore, puis, sous le coup de l’émotion, répond en commettant un fabuleux lapsus : «Vous ne pouvez pas comprendre. Aujourd’hui, c’est toute la République qui est en deuil.»

République au lieu de monarchie : comme si, avec la disparition, à l’âge de 101 ans, d’Elisabeth Bowes-Lyon, veuve, depuis cinquante ans, de l’avant-dernier roi d’Angleterre, c’était la couronne britannique elle-même qui se retrouvait pulvérisée, avec coutumes, costumes, panaches, carrosses, cérémonies, apparat et rituels tous plus dinosauriens les uns que les autres. Et voilà que c’en serait fini? Impossible. Ou alors, autant parler de République...

Elizabeth Bowes-Lyon à 4 ans, avec son frère adoré, David, alors âgé de 3 ans.
Elizabeth Bowes-Lyon à 4 ans, avec son frère adoré, David, alors âgé de 3 ans. © AP/SIPA

Cela dit, le conte de fées, tel que la reine mère le mit si somptueusement en scène, s’apparenta plus aux loufoques fantasmagories de Lewis Carroll qu’à la guimauve façon «Un jour mon prince viendra». En public, certes, enveloppée dans ses mousselines mauves ou vert pomme, et coiffée d’improbables bibis encore plus acidulés, Elisabeth Bowes-Lyon, l’exquise Queen Mum, symbolisait parfaitement la tribu Windsor. Mais en privé la reine mère (un titre inventé rien que pour elle, en 1952, après le décès de son mari) se signala plutôt pour se livrer sans vergogne à nombre d’autres petits péchés parfaitement inavouables, la lecture assidue de récits macabres façon Jack l’Eventreur; la consommation quotidienne d’une demi-bouteille de gin, la passion des chiens et des courses de chevaux, auxquels elle parla toujours plus tendrement qu’à ses enfants et petits-enfants. Ce qui laisse à penser que le personnage était infiniment plus complexe que ne le laissaient paraître ses sourires sucrés. Hitler ne s’y trompa pas, qui lui décerna le titre de «femme la plus dangereuse d’Europe». Donc deux faces radicalement opposées, chez ce personnage dont la longévité exceptionnelle résume aussi le XXe siècle – elle était née le 4 août 1900, soit un an avant la mort de l’impératrice Victoria. Il est vrai que la vitalité peu commune dont la nature l’avait dotée fut aussi fortement trempée – dans tous les sens du terme – par une rude et humide enfance dans les brumes écossaises du château de Glamis. En d’autres temps, lady Macbeth y avait souillé ses blanches mains en enfonçant sa dague dans les tripes de lord Duncan. Depuis cette sanguinolente époque, un loup-garou velu aurait parcouru les escaliers et les combles du château. Dès l’âge de 6 ans, ces récits hantèrent l’imagination de la jeune et hardie Elisabeth; et comme elle n’avait déjà peur de rien, sauf des dentistes, elle se fit fort d’organiser pour ses amies nombre de chasses au monstre, quand elle ne reconstituait pas, au long des remparts, des attaques à l’huile bouillante.

Ces frasques finissent tout de même par lasser le personnel domestique – à l’époque, pourtant, fort docile – et comme Elisabeth était strictement incapable d’arriver à l’heure à l’école, on décida de lui assigner des précepteurs qui lui firent entrer dans le crâne le vade-mecum de toute jeune fille de bonne famille qu’on promettait à un brillant mariage : broderie, piano, danse mondaine, leçons de maintien, apprentissage du français. Elisabeth s’échinait vaille que vaille à ces passionnantes études quand la guerre de 14 éclata. En fait de loup-garou velu, elle vit alors débouler à Glamis des hordes de poilus, fort éclopés pour la plupart. Le château fut transformé en hôpital. Loin de s’en lamenter, miss Bowes-Lyon préféra très vite se pencher sur les bandages des gueules cassées plutôt que sur les tournicotis de son point de chaînette, et résolut illico de jouer à l’infirmière.

Le 26 avril 1923, Elisabeth quitte le domicile londonien de ses parents pour monter dans le carrosse qui va la conduire à l’abbaye de Westminster, où elle dira oui au prince Albert.
Le 26 avril 1923, Elisabeth quitte le domicile londonien de ses parents pour monter dans le carrosse qui va la conduire à l’abbaye de Westminster, où elle dira oui au prince Albert. © SIPA
Après la cérémonie, les jeunes mariés sacrifient au rituel de la photo de famille.
Après la cérémonie, les jeunes mariés sacrifient au rituel de la photo de famille. © SIPA

Cette soudaine vocation médicale était soutenue par une découverte qui décupla sa passion de l’asepsie et du Mercurochrome : à force de se pencher au-dessus des lits de ces messieurs, elle avait mesuré l’emprise qu’elle exerçait sur la gent masculine. Ainsi, à titre d’exemple, juste avant d’expirer, un soldat lui avait chuchoté : «Vous avez des yeux si doux, un sourire si frais...» Et c’est vrai que, sans être sublime, la jeune Elisabeth avait un charme fou. De petite taille, certes – 1,52 mètre – mais dotée d’yeux bleus étonnamment directs et limpides, elle fascinait aussi par sa carnation – le fameux teint «Perfect English Rose» – qu’elle aura le tact de transmettre à chacune de ses filles. A quoi il faut ajouter la gaieté. Dès qu’elle fut rentrée à Londres, où ses parents s’étaient réinstallés à la fin du conflit, elle commença à traîner tous les cœurs après soi. Ses prétendants étaient ravis d’échapper à la chape des conventions victoriennes. Mais ils déchantaient vite : dès qu’on lui effleurait un millimètre de peau, miss Bowes-Lyon prenait ses jambes à son cou...

Blocage névrotique, pareil à ceux dont tentait de délivrer ses patientes, à la même époque, à Vienne, le bon Dr Freud? Ou savante stratégie d’intrigante qui voyait loin? La seconde hypothèse paraît la plus plausible. Il semble bien qu’à l’époque la jeune aristocrate n’avait qu’un but : côtoyer la famille royale. Dès 1919, elle se lie d’amitié avec l’une des princesses du sang puis, par de savants mouvements d’approche, se retrouve dans le cercle qui entoure le prince de Galles – le futur Edouard VIII. Celui-ci résumera plus tard sa personnalité d’une formule lapidaire : «Une petite garce glacée.» L’épisode mérite d’être relevé, si l’on tente de comprendre la haine inexpiable dont elle poursuivra ensuite Edouard VIII et Wallis Simpson.

Car, pour qui sait observer, les deux aspects de sa personnalité sont déjà détectables. Mais certainement pas par le propre frère du prince de Galles, Albert, dit Bertie, qui, comme tant d’autres, après quelques danses avec elle, s’en éprend follement lors d’une réception mondaine. Mais Elisabeth le snobe : elle, s’embarrasser de ce grand dadais timide, hypernerveux, ulcéreux, lunatique, porté sur le whisky et bègue par surcroît? Alors qu’elle est la coqueluche de Londres, courtisée de plusieurs princes, dont un prestigieux séducteur écossais qui vient de rompre ses fiançailles pour ses beaux yeux myosotis? Elle vise plus haut.

Déjà, le jeune couple (ici lune de miel à Polesden Lacey, en mai 1923) se distingue du reste de la famille royale en présentant une image naturelle, décontractée, dans un univers qui a conservé l’austérité de l’ère victorienne.
Déjà, le jeune couple (ici lune de miel à Polesden Lacey, en mai 1923) se distingue du reste de la famille royale en présentant une image naturelle, décontractée, dans un univers qui a conservé l’austérité de l’ère victorienne. © AP/SIPA

Pourtant, le grand dadais insiste. Il l’invite à Sandringham, haut lieu des chasses royales, et lui fait sa déclaration. En pure perte. Ce petit jeu cruel durera trois ans. Mais le Bertie, tout dadais qu’il soit, sait qu’il n’est nulle plate-forme qui ne résiste à des assauts répétés. Il se ménage alors l’appui de sa mère, la reine Mary, laquelle, comme dans un roman de Jane Austen, fait entrer dans son complot matrimonial la propre mère d’Elisabeth. En 1923, la Célimène anglaise cède enfin à son misanthrope et convole avec lui par un doux jour d’avril. La voici duchesse d’York et, chez les Windsor, première femme de lignée non princière à épouser un homme de sang royal. Elle a 22 ans; elle a rempli son objectif : entrer dans le sillage des princes et des majestés. Au prix, certes, d’un mariage de raison. Mais miracle : au fil des mois, à mesure qu’elle se met à partager avec son Bertie l’ordinaire de sa vie – réceptions, voyages officiels, safari au Kenya, croisière en Océanie –, Elisabeth se met à l’aimer. Son charme s’en trouve décuplé : partout où passe le couple, elle est acclamée.

Pour asseoir sa popularité grandissante, elle se limitera à de charmantes photos de famille en compagnie de son mari et de ses filles : Elisabeth, née en 1926; la seconde, Margaret, naîtra quatre ans plus tard. Deux chérubines si roses, si blondes et si ravissantes qu’elles suffisent à accréditer l’image d’une famille radieuse et entièrement dévouée au peuple, alors que le prince de Galles, lui, semble plutôt frivole et d’une sexualité incertaine. Aussi, en 1933, c’est elle qui l’expédie au pays de Galles pour tenter d’apaiser le conflit qui oppose les mineurs aux autorités gouvernementales...

Mais en réalité, sous les apparences gentillettes de son petit ménage bien tranquille, Mrs Windsor a quelques idées sur la question, et qui ne sont pas nécessairement progressistes. Néanmoins, comme toujours, elle attend son heure et se tait. Et le moment ne tarde pas : lorsque son beau-frère, le prince de Galles, devenu roi à la mort de son père, en 1936, abdique pour les beaux yeux – bleus eux aussi – de l’Américaine deux fois divorcée Wallis Simpson, le cher Bertie, du jour au lendemain, se retrouve contraint de prendre la suite. Personne ne l’a préparé à être roi. La dépensière et capricieuse Elisabeth s’y emploiera.

La situation, pourtant, est parfaitement catastrophique : le chômage est effrayant, la classe ouvrière conteste le coût exorbitant des dépenses monarchiques, les intellectuels lorgnent vers Staline, et les aristos, comme les businessmen de la City, penchent du côté de Hitler. Quant à Bertie, contrairement à son frère, il n’a rien de médiatique. Premier obstacle à vaincre : son bégaiement. Elisabeth remue ciel et terre pour trouver la crème des orthophonistes, le déniche au fin fond de l’Australie et le commet d’office à la rééducation de son mari. Non sans y adjoindre, au moment des allocutions publiques, un adjuvant de son cru : une bonne rasade de whisky. Voici donc que Sa Majesté George VI débite maintenant ses discours comme un acteur de la Royal Shakespeare Company. Et Elisabeth l’encourage avec la même ardeur à soutenir la politique pacifiste de Chamberlain face à Hitler.

Elizabeth et Albert, lorsqu’ils n’étaient que duc et duchesse d’York, désiraient vivre la vie la plus normale possible, loin des formalités du protocole. Ils n’hésitaient pas, comme ici en 1936, à se laisser photographier en toute simplicité, jouant avec leurs filles Elisabeth et Margaret et leurs chiens dans le parc de Windsor.
Elizabeth et Albert, lorsqu’ils n’étaient que duc et duchesse d’York, désiraient vivre la vie la plus normale possible, loin des formalités du protocole. Ils n’hésitaient pas, comme ici en 1936, à se laisser photographier en toute simplicité, jouant avec leurs filles Elisabeth et Margaret et leurs chiens dans le parc de Windsor. © Lisa Sheridan/Studio Lisa/Hulton Archive/Getty Images

Puis la nouvelle reine s’acharne sur Wallis Simpson, qu’elle exècre. Elle parvient à lui faire refuser le titre d’altesse royale – la malheureuse Wallis, qui y tenait tant, en apprendra la nouvelle le jour même de son mariage et manquera de fondre en larmes sous l’objectif des photographes. A l’époque, le Français Daladier porte d’ailleurs sur Elisabeth ce jugement sans appel : «C’est une femme dévorée d’ambition et prête à sacrifier n’importe quel pays afin de rester reine.» En somme, à la veille de la guerre, tous ses préjugés de classe l’auraient recluse dans l’aigre personnage de Mrs Windsor, si ne s’étaient abattus sur Londres, nouveau et paradoxal miracle, les bombardements allemands.

Et voilà que d’un seul coup resurgit l’autre face d’Elisabeth, celle qui, durant la guerre de 14, avait fait d’elle l’héroïque infirmière de Glamis. Ici, sous les V2, elle la transformera en quelques semaines en mère de la nation. Alors qu’elle déteste le belliciste Churchill, elle se met à le soutenir. La guerre ranime toutes ses énergies; elle se démène toute la sainte journée pour remonter le moral des Anglais. Après chaque raid de blitz, elle entraîne le roi dans les gravats : jamais un monarque anglais, jusque-là, ne s’était mêlé à la foule. Elle s’exerce tous les matins à tirer au revolver, sauve le chien d’un ouvrier prisonnier des décombres de sa maison, et, le jour où Buckingham est touché par des bombes, elle exulte : «Au moins, désormais, je vais pouvoir regarder en face les gens de l’East End » (les quartiers pauvres). Au milieu de tout ce chaos, fine politique, elle trouve encore les moyens de faire des risettes à de Gaulle, alors en exil à Londres, et dont les rapports avec Churchill, c’est le moins qu’on puisse dire, n’étaient pas au beau fixe; le Général saura s’en souvenir, qui lui lancera un jour en témoignage de remerciement : «Madame, le roi et vous avez été les deux seules personnes qui ont toujours su faire preuve de compréhension et d’humanité lors de mon exil londonien.»

Précédant son mari, George VI, en uniforme, Elisabeth enjambe hardiment les décombres devant le palais de Buckingham, après le bombardement du 10 septembre 1940.
Précédant son mari, George VI, en uniforme, Elisabeth enjambe hardiment les décombres devant le palais de Buckingham, après le bombardement du 10 septembre 1940. © AP/SIPA
Durant toute la guerre, quelles que soient les circonstances, Elisabeth a toujours voulu garder son élégance. Une façon d’honorer ses sujets et, en premier lieu, les soldats. Comme ces paras qui, deux semaines plus tard, participeront au Débarquement.
Durant toute la guerre, quelles que soient les circonstances, Elisabeth a toujours voulu garder son élégance. Une façon d’honorer ses sujets et, en premier lieu, les soldats. Comme ces paras qui, deux semaines plus tard, participeront au Débarquement. © Capt. E G Malindine/ Imperial War Museums via Getty Images

Sa popularité atteint alors des sommets, d’autant qu’elle a vaillamment refusé d’aller se mettre à l’abri avec ses filles, comme on le lui conseillait, au Canada. Elle ne désemparera pas jusqu'à la fin du conflit. Dès ce moment, son personnage est définitivement figé dans le rôle de la royale héroïne. Le respect lui est durablement et unanimement acquis. Tout au long des décennies suivantes, alors même que l’image de la monarchie ne cessera de se dégrader, la sienne restera intacte, avec une affection populaire croissante à mesure que l’âge tasse sa silhouette et constelle de ridules son visage immuablement souriant. Mais, pour se retrouver au second plan, la reine mère n’en continue pas moins de régenter avec une poigne d’acier toute sa petite tribu. Elle s’oppose avec la plus extrême violence aux amours de sa fille Margaret avec Peter Townsend, qui avait pourtant divorcé pour sa dulcinée, et réussit, à force d’acharnement, à empêcher leur union. C’est encore elle, vingt-cinq ans plus tard, qui concocte, avec sa vieille amie lady Fermoy, les désastreuses noces de Charles et Diana, alors qu’elle savait que son petit-fils en pinçait pour Camilla. Qu’il la reprît pour maîtresse dans quelque temps lui paraissait dans l’ordre des choses. Diana ne se trompait pas sur l’exquise Queen Mum. Elle répétait alors à qui voulait l’entendre : «La reine mère est la patronne de la léproserie Windsor.»

Laquelle patronne se fichait éperdument des cancanages de la donzelle. Elle continua à mener son grand train de reine mère, alternant ses séjours dans ses quatre châteaux selon son humeur du jour, et se ruinant toujours, à 85 ans passés, en yearlings, bijoux, robes, champagne, chapeaux, excentricités, sans que personne ose y redire, en raison de son glorieux passé. Elle mena sa dernière, et plus farouche bataille, en 1993 quand la reine, terrifiée à l’idée de lui annoncer elle-même qu’elle devrait désormais se soumettre à l’impôt, laissa ce soin à son secrétaire particulier, Robert Fellowes. «L’entretien le plus pénible qu’il m’ait été donné de vivre», confiera-t-il plus tard. La reine mère, tout bonnement, lui représenta qu’elle préférait mourir que de céder un penny à l’Etat britannique.

Au baptême d'Harry en 1984. La «Granny» préférée des Anglais avait 6 petits-enfants et 9 arrière-petits-enfants.
Au baptême d'Harry en 1984. La «Granny» préférée des Anglais avait 6 petits-enfants et 9 arrière-petits-enfants. © LORD SNOWDON / Rex Feat/REX/SIPA

Le malheureux ne s’en sortit qu’en déployant des trésors de diplomatie; car, pour le reste, la coutume voulait qu’on laissât Queen Mum vivre exactement à sa guise; privilège de son âge, sans doute, mais aussi de son indéfectible optimisme : au lendemain du décès de Diana, n’était-ce pas elle qui avait rendu la joie de vivre à Charles, alors menacé par une sévère dépression? Et puis, tant qu’elle serait de ce monde, n’était-elle pas l’incarnation vivante de la monarchie britannique?

Elle pouvait bien boire quatre verres de bordeaux par repas, s’adonner à son appétit gargantuesque, siffler une demi-bouteille de gin à l’heure du thé en faisant semblant de boire son Darjeeling, vider son compte en banque en misant sur le mauvais cheval, et débiter les pires horreurs sur son prochain pour faire rire ses invités, on lui passait tout. Pensez donc : une femme qui avait tenu tête à Hitler! Fabriqué un roi à partir d’un dépressif chronique... Éduqué une reine qui, depuis cinquante ans, tenait son rôle sans ciller, contre vents et marées. Enfin la reine mère n’avait-elle pas tenu sa dernière promesse : vivre au-delà de 100 ans...

Le 4 août 2001 (en médaillon) c’est en reine mère qu’elle salue la foule réunie devant sa résidence de Clarence House pour fêter ses 101 ans.
Le 4 août 2001 (en médaillon) c’est en reine mère qu’elle salue la foule réunie devant sa résidence de Clarence House pour fêter ses 101 ans. © BOISIERE/SIPA

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